Après la débâcle de Dunkerque, l'armée britannique a redécouvert « l'état de choc ». Cette condition, qu'après la Première Guerre mondiale on pensait pouvoir traiter grâce aux compétences des officiers supérieurs, a affecté un grand nombre de troupes évacuées de France. Face à l'imminence de l'invasion par le troisième Reich, la Grande-Bretagne avait besoin de remettre en « forme de combat » autant de ces hommes que possible. A époque désespérée, mesures désespérées : des troupes choquées ont été admises dans des sanatoriums civils où des psychiatres civils ont pu en toute impunité procéder à des expériences sur un grand nombre de sujets, volontaires malgré eux…
Situation
Les personnages se retrouvent à l'hôpital Sutton dans le Surrey, à l'automne 1940, après avoir été évacués de la poche de Dunkerque. On a diagnostiqué chez eux une « fatigue de bataille » provoquée par leur retraite devant une force ennemie supérieure en nombre, puis par jusqu'à quatre jours d'attente forcée sur une plage bombardée et mitraillée en rase-mottes par ce même ennemi supérieur en nombre.
Le Dr William Surgant est le psychiatre chef de l'hôpital et il a commencé à administrer de fortes doses d'amatol de sodium aux soldats choqués. Il cherche à briser la fatigue de bataille en mettant les soldats affectés en « narcose profonde » durant trois semaines, afin d'éliminer le stress provoqué par des nuits de terreur. Surgant expérimente également l'insuline pour induire un coma et vaincre ainsi plus rapidement la fatigue de bataille. Quelques soldats sombrent dans un coma permanent avant même qu'un thé sucré leur soit servi, mais il s'agit juste de pertes collatérales dues à la guerre.
Durant ces longues périodes d'assoupissement forcé, les personnages font d'étranges rêves ; certains sont communs à tous, d'autres sont plus personnels, parmi lesquels :
- D'épuisantes semaines à défendre un col battu par les vents dans les montagnes du Sommet du Monde, au corps à corps contre de sombres hordes déferlant sans fin sur les défenses et leurs défenseurs.
- La répétition surréaliste de la mort d'un ami que l'observateur (ou les observateurs) est incapable d'interrompre ou de modifier.
- L'accomplissement d'une merveilleuse patrouille dans un pays imaginaire au sein de la Troupe des Bronzés. Traversée de contrées exotiques, rencontre avec des personnes merveilleuses et visions d'animaux fabuleux, mais étrangement tous ont l'air de s'ennuyer.
- A l'intérieur d'un rêve, le rêve d'une interminable série de sa propre mort ; le rêveur s'éveille, sans savoir s'il est en train de rêver jusqu'à ce qu'il périsse – à nouveau – d'une terrible manière.
- Le rêveur est témoin d'une scène au cours de laquelle un compagnon est déchiqueté membre par membre par un infect habitant des Contrées du Rêve. Au lieu d'être éclaboussé de sang et d'entrailles, le rêveur est couvert de pétales de fleur et de fruits. De petits arbustes se mettent à pousser à l'endroit où les morceaux du corps touchent le sol. Lorsque le rêveur revient en ce lieu, l'arbuste porte en guise de fruits de petites têtes criardes qui ont l'apparence du compagnon disparu.
Durant les périodes où les personnages sont éveillés afin de prendre leurs repas, ils commencent à réaliser qu'autour d'eux le nombre de leurs camarades décroît. A chaque phase de narcose, un visage familier disparaît d'un lit voisin. Si les infirmières sont interrogées sur les absents, elles tentent d'éluder la question, prétendant qu'ils ont recouvré la santé ou qu'ils ont été transférés dans un autre hôpital. Si les joueurs insistent, certaines d'entre elles essayent d'apaiser leurs craintes par la promesse de leur accorder une danse « quand ils iront mieux » ; d'autres deviennent distantes et plus froides, comme si quelque chose les effrayait plus que la vérité. Les médecins refuseront catégoriquement de répondre aux questions et ordonneront un autre traitement plus douloureux.
Le personnel auxiliaire – femmes de ménage, dames de compagnie et plantons – est un peu plus sociable: quelque chose d'étrange se produit la nuit. Les infirmières de nuit font état de formes et de bruits étranges. Les plantons du matin ont arrêté de siffloter pendant leur travail, comme si quelque chose écoutait. Les dames de compagnie ne semblent plus si gaies et disent que la faute en revient au climat oppressant entretenu par la nouvelle direction de l'hôpital.
Possibilités
Inspirations
Les Gardiens pourront visionner le documentaire "Shell-shocked" diffusé sur Channel 4 UK en novembre 1998 et le film « L'Echelle de Jacob » d'Adian Lyne (1991).